BRICS : « Dédollarisation » de l’économie mondiale, un gain surtout politique

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Pour certains analystes, la « dédollarisation » économique est un gain économique plutôt discutable pour les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Explications de Sylvain Bersinger, économiste chez Asterès.

Les BRICS cherchent à contourner l’utilisation du dollar, sans que l’intérêt économique de cette démarche soit évident. Le dollar est la monnaie de référence dans le monde, ce qui signifie que le dollar est aux autres monnaies ce que la monnaie est en général aux biens, aux services et aux actifs. Par exemple, lorsqu’un Moldave veut obtenir du peso argentin, il change d’abord ses lei en dollars, puis, ses dollars en pesos, ce qui est plus pratique et moins coûteux que de chercher un détenteur de pesos désireux d’obtenir des lei. En ce sens, le dollar est la « monnaie des monnaies », une situation qui, en soit, ne confère pas d’avantage économique aux Etats-Unis ni de coût pour les BRICS. Si le dollar était moins utilisé dans les transactions internationales au profit du yuan (chinois) ou de la roupie (indienne), par exemple, le gain économique pour la Chine ou l’Inde est peu évident, il se peut même que cette situation diminue la liquidité dans les transactions internationales et donc augmente (légèrement) le coût des échanges.

L’intérêt de la « dédollarisation » semble, donc, plutôt, symbolique et politique. Une monnaie véhicule un symbole fort, comme l’a par exemple montré l’euro (pensé entre autres comme un symbole d’unité européenne) ou certaines monnaies régionales ancrées dans des territoires à l’identité forte (comme l’eusko au Pays-Basque). A ce titre, il peut être séduisant pour les BRICS de diminuer le rôle du dollar et d’accroître celui de leurs propres monnaies de manière à symboliser leur autonomie par rapport aux Etats-Unis. Des considérations politiques peuvent, également, entrer en ligne de compte. Par exemple, en contrôlant le dollar, les Etats-Unis peuvent plus facilement imposer des sanctions économiques en bloquant l’utilisation de leur monnaie (par exemple à l’égard de Cuba, de l’Iran ou de la Russie), une menace potentielle à laquelle la Chine pourrait vouloir se soustraire.

Sylvain Bersinger

économiste chez Asterès

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