GUERRE AU SOUDAN : Ismaël Omar Guelleh pourrait-il devenir médiateur à la place de William Ruto ?

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Au cours d’une conversation téléphonique datant d’il y a quelques jours, Antony Blinken, le secrétaire d’Etat américain, a félicité William Ruto, le président du Kenya, pour son engagement dans la résolution du conflit soudanais. Un acte qui s’apparente à de la provocation pour le Soudan puisque le chef d’Etat kenyan ne fait que mettre le feu aux poudres

Pour rappel, William Ruto (sur notre photo avec le président Ruto du Kenya) a été désigné par l’IGAD (Organisation intergouvernementale pour le développement) à la tête d’un comité de médiation pour réconcilier les deux seigneurs de guerre, al-Burhane et Hemedti. Un choix vivement critiqué dès le départ par al-Burhane et son camp en raison des soupçons de manque d’impartialité du dirigeant kenyan. Ce dernier a réussi à se mettre tout Khartoum à dos après qu’il ait accepté de recevoir, Youssef Ezzat, un émissaire d’Hemedti, à Naïrobi, le 03 juin, quelques jours seulement après avoir reçu la visite de Malik Agar Nganyoufa, l’envoyé spécial d’al-Burhane. Du jamais vu dans les processus de médiation où l’organisation d’une telle rencontre peut, à la limite, encore être envisageable avec l’accord explicite de la partie la plus légitime. En l’occurrence ici, les forces armées soudanaises. Résultat des courses, les combats sont plus intenses que jamais, et la crise ne fait que s’accentuer.

D’abord énervées que l’identité du médiateur, certainement, déjà connue, leur ait été dissimulée tout au long de la conférence de l’Igad du 12 juin dernier à Djibouti, et qu’elles aient, par la suite, été informées qu’il s’agissait de l’homme fort de Nairobi, al-Burhane et ses hommes ne cessent, depuis, de réclamer son remplacement, l’accusant même d’agir pour les intérêts d’une mystérieuse nation. De laquelle s’agit il ? Les Emirats arabes unis ? Possible, ils veulent étendre leur domaine d’influence au delà de la Mer Rouge. La Russie ? Egalement possible, vu que l’agenda militaire de Moscou dans cette zone est conditionné par l’existence des organes législatifs et leur approbation. L’Arabie Saoudite ? Moins probable, étant donné le retour en puissance du prince héritier, Mohamed Bin Salman, dans la diplomatie internationale. Bref, c’est difficile à dire.

De son côté, le chef d’Etat, William Ruto, non content d’avoir perdu sa crédibilité auprès du gouvernement soudanais, s’est assuré de parachever son œuvre en menaçant de faire déployer une force armée régionale au Soudan. Une pique à laquelle Yasir al-Atta, un officier supérieur de l’armée soudanaise, n’a pas pu résister en daignant le dirigeant du Kenya de passer à l’acte, s’il s’en croit capable.

Le processus de médiation de l’IGAD au Soudan ayant été torpillé dans l’œuf par William Ruto, la question du remplacement de ce dernier ne se pose absolument plus. Il urge qu’Ismaïl Omar Guelleh, le président du Djibouti et président en exercice de l’IGAD, prenne, lui-même, les commandes de ce dossier, et fasse montre de sa grande expérience dans la résolution des conflits armés pour rattraper les dégâts causés par son homologue du Kenya.

Paul Patrick Tédga

MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)

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