Après la convocation des ministres, Mays Mouissi et Charles Mba, pour une séance d’explication à la CNLCEI (Commission nationale de lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite), le Gabon est, aujourd’hui, secoué par une affaire de conflit d’intérêt, sans nom, qui touche le sommet du gouvernement. Autrement dit, l’ancien ministre de l’Economie et son collègue des Finances, ainsi que, le premier ministre, lui-même, sont empêtrés dans des affaires de corruption. Y a-t-il encore un gouvernement au Gabon ?
L’affaire est grave. Raymond Ndong Sima, premier ministre de son état, en poste, aurait créé une société agricole, AGROPAG (Société agropastorale du Gabon), en mai 2024. Jusque là, rien à redire si c’était pour le compte de l’Etat. Que non ! Car chemin faisant, on découvre qu’il en est le véritable propriétaire. Ne pouvant pas la diriger lui-même, il a confié sa gestion à son conseiller agricole à la primature, Guy Anicet Rerambyath. Et pour faciliter son fonctionnement, la SARL AGROPAG, sans autre forme de procès, a, carrément, été domiciliée dans l’immeuble même de la primature. Et pour couronner le tout, AGROPAG est installée à Ndendé, sur un domaine privé de l’Etat.
Pour faciliter son fonctionnement, Raymond Ndong Sima avait demandé au ministre de l’Agriculture de l’époque, Jonathan Ignoumba, de mettre à sa disposition, du matériel agricole sous forme d’engins et d’intrants. Refus sec du ministre, Jonathan Ignoumba, AGROPAG étant une société privée avec un capital de 50 millions de F CFA dont Ndong Sima est le vrai propriétaire. La sanction du premier ministre a été sans appel : il l’a dégagé de l’Agriculture pour l’exiler aux Transports où il ne sera plus un empêcheur des détournements planifiés (sur notre photo, Raymond Ndong Sima se montre agriculteur à ses heures perdues).
Ces derniers jours, le premier ministre est apparu à la télévision pour accuser réception de 2.000 bœufs pour un montant de 7 milliards de F CFA dont le but serait de réduire les importations de la viande de bœuf au Gabon, qui creusent le déficit de la balance commerciale. Ceci expliquant cela, cette cargaison de bœufs devait atterrir dans sa propre exploitation. Et aux dires des Gabonais, c’est à peine quelques centaines de bœufs qui ont foulé le sol du pays de Léon Mba. Où sont passés les autres ? Qu’a réellement servi cette somme de 7 milliards de F CFA ? Visiblement, la CNCLEI aurait fort à faire dans les prochains jours, sauf si elle s’assoit sur ce dossier bien embêtant.
Du coup, beaucoup de questions se posent : lui-même étant embourbé dans les affaires comme ce conflit d’intérêt qui devrait conduire à sa démission, Raymond Ndong Sima ne freine-t-il pas les enquêtes judiciaires sachant qu’une telle impunité est profitable à tous ses ministres kleptomanes y compris à lui-même ?
Maintenant que les magistrats ont le droit de se présenter aux élections, la justice s’est officiellement politisée car les jugements seront rendus à la tête du client et en fonction des intérêts directs des magistrats selon qu’ils lorgnent telle ou telle élection à venir. C’est un inconvénient majeur qu’on peut relever dans le nouveau code électoral qui a du bon pour les femmes et les jeunes dont 30% et 20% doivent figurer sur les listes électorales.
Terminons en indiquant que le « Coup de la libération » du 30 août 2023 a été justifié par l’éradication de telles pratiques qui peinent encore à être éradiquées. Aller à l’élection présidentielle, le 12 avril, avec une équipe gouvernementale ainsi compromise, fait vraiment « façon façon ». Que le général-président prenne ses responsabilités. Tout simplement.