Alors que nous annoncions dans notre dernier numéro double 527-528 des mois de décembre 2023 et janvier 2024, actuellement , en kiosque (au Gabon), l’apparition progressive des Anti-Oligui Nguema dans l’opposition gabonaise et la famille Bongo, la grogne se fait, désormais, également, sentir au sein de la société civile, en particulier, dans le corps enseignant et la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG). Les militaires au pouvoir viennent de raser la tête des syndicalistes de la SEEG incarcérés pour contestations. Raser la tête d’une femme (il y en avait deux) et celle de personnes proches du troisième âge, dans un pays démocratique comme veut l’être le Gabon, c’est de la pure et simple dictature. N’ayons pas peur de mots. C’est quelque chose à ne plus faire par le CTRI s’il veut garder sa crédibilité aux yeux de tous les Gabonais. C’est de moins en moins le cas.
A la décharge du général-président de transition, on peut affirmer que pour arriver au Palais du Bord de Mer, il ne s’est pas préparé. N’a fait aucune campagne électorale pour vendre ses idées. C’est le devoir qui l’a conduit à prendre ses responsabilités. Mais qu’il fasse, désormais, très attention. L’engouement du 30 août et des jours d’après, n’est plus le même aujourd’hui. Loin de là. La popularité du général-président, Brice Oligui-Nguema, est en train de fondre comme neige au soleil. Deux exemples le montrent :
Le 18 octobre dernier, la ministre de l’Education nationale, Camélia Ntoutoume-Leclercq, fut contrainte de rencontrer les syndicats d’enseignants (SYNEPFOP et SYNFEP) après que ces derniers eurent menacé de lancer un mouvement de grève pouvant paralyser l’ensemble du système éducatif du pays. Leurs revendications portaient, notamment, sur les vacations comptant pour l’année 2023, et toujours non réglées par l’Etat. Les syndicalistes avaient alors obtenu des assurances de leur tutelle quant au traitement expéditif de leurs requêtes dans les semaines à venir. Seulement, près de deux mois après cette rencontre, aucune régularisation n’a été initiée par le pouvoir en place. Face à cette situation, des appels à mobilisation sont en train d’être lancés pour obliger le président de transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, à remplir son engagement d’améliorer la qualité de l’éducation au Gabon, lequel dépend, en grande partie, de la valorisation des acteurs du secteur.
Concernant la SEEG, les employés ont contesté la décision de leur haute hiérarchie de ne pas procéder au traditionnel versement de leur gratification pour cette année. Evoquant des tensions de trésorerie, la nouvelle direction générale a préféré renvoyer cette responsabilité au Conseil d’administration, où siège l’Etat, en sa qualité d’actionnaire principal. Informé de la situation qui prévaut à la SEEG, et des menaces de grève brandies par les effectifs de cette entreprise publique, le général-président a laissé entendre que des sanctions pourraient tomber. Une réponse cinglante qui n’a, évidemment, pas été bien accueillie par le personnel, tant pour son caractère militaire que pour sa remise en question, à peine voilée, du droit de grève, en principe, acquis à tout salarié, et figurant, pourtant, dans le code du travail gabonais. S’estimant lésés, certains employés se sont alors emportés, tenant des propos injurieux à l’endroit du président de la transition. Suite à l’interpellation de ces derniers par les forces de l’ordre pour écart de langage, leurs délégués du personnel et représentants syndicaux ont été obligés de formuler des excuses publiques. Précisons que les syndicalistes qui se sont retrouvés en prison, pendant trois jours, en sont sortis la tête complètement rasée. Des méthodes d’un autre temps même si le gouvernement est militaire. C’est inacceptable !
De véritable libérateur adulé, il y a à peine 3 mois, à leader calomnié, aujourd’hui, Brice Clotaire Oligui Nguema est en train de complètement glisser. Il perd les pédales. Ce n’est pas parce qu’on est militaire qu’on doit être violent. Le Gabon a besoin de militaires intelligents et capables de savoir dialoguer avec le peuple, pendant cette transition, sinon, c’est le dérapage assuré. Le général-président le comprendra-t-il pour savoir s’y prendre avec ses (parents) gabonais ? Ses détracteurs, de plus en plus nombreux (il doit vraiment faire attention), espèrent, en tout cas, que ce genre d’incidents embarrassants devienne monnaie courante.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)