TURQUIE : Recep Tayyip Erdogan et la politique migratoire de deux poids deux mesures

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Alors que la Tunisie poursuit la traque des migrants d’Afrique subsaharienne en situation irrégulière présents sur son territoire, la Turquie vient, elle-aussi, de se lancer dans une opération similaire. Les autorités turques ayant, déjà, interpellé plus de 15 791 personnes et expulsé plus de 10 000 d’entre elles, depuis le début de ce mois de juillet. De quoi satisfaire les partis extrémistes de droite turcs.

Ces statistiques issues du ministère de l’Intérieur turc traduisent l’engagement du gouvernement à contenir l’immigration clandestine partant de la Turquie vers des pays de l’Union européenne, en particulier, l’Italie et la Grèce depuis janvier 2023. Les deux nations européennes ayant du mal à gérer les vagues record de migrants tentant la traversée à partir des ports tunisiens, et devant, désormais, se soucier de ceux venant des ports turcs.

La route migratoire turque, étant moins populaire que la méditerranéenne pour les Africains car elle est beaucoup plus longue, est devenue le premier choix des Guinéens, Ivoiriens et autres ressortissants d’Afrique subsaharienne suite au durcissement de la politique migratoire en Tunisie.

D’autre part, le visa touristique turc étant relativement facile à obtenir, les migrants venant d’Afrique, une fois arrivés en Turquie, n’ont pas grand mal à trouver des passeurs locaux pour les aider à traverser.

S’il est logique que Recep Tayyip Erdogan fait tout son possible pour contenir l’immigration clandestine à son niveau par égard aux plaintes de ses partenaires de l’Union européenne, dont il espère un jour devenir membre, il est inadmissible qu’il s’en prenne aux migrants n’étant pas en situation irrégulière.

En effet, plusieurs témoignages font le récit de raffles et de violations de droits humanitaires à l’encontre d’Africains vivant en Turquie attendant que la demande de renouvellement de leur titre de séjour ou de la mise à jour de leur statut soit traitée.

Il est, également, à noter que les orientations en matière de traque migratoire communiquées par le président turc à son ministre de l’Intérieur, Ali Yerlikaya, ne semblent nullement concerner les ressortissants non-africains, à savoir, les Afghans, Syriens, Pakistanais, Irakiens et Iraniens, alors que ces derniers sont de loin les plus nombreux.

S’ils avaient été informés au préalable de la mise en place de cette politique migratoire de deux poids deux mesures, il est certain que plusieurs chefs d’Etat africains n’auraient (peut-être) pas effectué le voyage pour féliciter Recep Tayyip Erdogan d’avoir été réélu.

Paul Patrick Tédga

MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)

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